Télétravail à l’étranger : quelles obligations légales pour l’employeur ?

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Le télétravail depuis l’étranger attire de plus en plus d’entreprises en recherche de souplesse organisationnelle et d’expériences interculturelles. Cette pratique suppose toutefois que l’employeur respecte un ensemble d’exigences juridiques, fiscales et organisationnelles non négligeables. Rédaction d’un cadre formel, détermination d’une législation applicable, prévention des risques liés à la cybersécurité, au bien-être du salarié, ou encore à la fiscalité : tous ces aspects doivent être encadrés pour assurer la conformité et protéger à la fois l’entreprise et ses collaborateurs.

Obligations légales pour l’employeur

Droit du travail

Quand un salarié souhaite exercer son activité à distance et hors du territoire national, son employeur doit émettre une autorisation écrite. Celle-ci figure dans une charte de télétravail ou un accord collectif définissant les modalités et les pays concernés par cette organisation du travail. Il est aussi nécessaire de mentionner dans le contrat de travail la législation applicable, étant donné que, sans précision, le droit du pays où le salarié effectue principalement ses missions sera potentiellement retenu (selon les règles en vigueur dans l’Union européenne, notamment le Règlement Rome I). Cela peut engendrer des conséquences imprévues en cas de conflits juridiques. Une clause propre au télétravail international apparaît alors pertinente, précisant l’accord préalable de l’entreprise et la législation retenue.

À titre d’illustration, un tribunal français a confirmé le licenciement pour faute grave d’une employée ayant décidé de télétravailler depuis un autre pays sans en informer son entreprise. Cela met en lumière l’importance de la formalisation préalable via des écrits respectant le cadre interne établi.

Fiscalité

Le télétravail transfrontalier peut entraîner des obligations fiscales supplémentaires pour l’entreprise. En particulier, si un salarié exerce durablement ses missions depuis l’étranger, cela peut être interprété comme entraînant la création d’un établissement stable, au regard des conventions fiscales internationales (définies par l’OCDE). Cela signifie que l’entreprise pourrait être soumise à une fiscalité étrangère, incluant l’impôt sur les sociétés ainsi que d’autres taxes obligatoires dans le pays concerné.

Avant toute autorisation, il est conseillé à l’employeur de :

  • Analyser le type de missions réalisées et la durée envisagée
  • Étudier la fiscalité en vigueur dans le pays depuis lequel le salarié travaillera
  • Solliciter un professionnel spécialisé (avocat ou fiscaliste) pour évaluer les impacts concrets

Ne pas anticiper ces aspects peut engendrer des conséquences administratives ou fiscales complexes : pénalités, contestations, voire double imposition dans certains cas.

Sécurité informatique

Autoriser ses salariés à travailler depuis l’étranger implique de mettre en place des précautions supplémentaires en matière de protection des données et des systèmes d’information. L’entreprise doit s’assurer que ses collaborateurs utilisent des connexions fiables, même à distance, et que leur comportement numérique respecte les règles en conformité avec le RGPD, que les données soient traitées en France ou ailleurs.

Dans la charte de télétravail, il est pertinent d’inclure :

  • Des consignes favorisant l’usage de VPN ou d’autres réseaux sécurisés
  • Des règles relatives à l’accès, au transfert et au stockage des données
  • Un programme de sensibilisation à la cybersécurité, accessible à tous les salariés concernés

Le travail en dehors de l’environnement sécurisé du siège expose l’entreprise à des aléas tels que les intrusions informatiques, les pertes de données ou l’utilisation de connexions peu fiables. Des politiques internes renforcées et une sensibilisation continue permettent de limiter ces vulnérabilités.

Pour explorer davantage ce sujet, regardez cette vidéo explicative sur le télétravail international :

Santé et sécurité au travail

Même lorsque le salarié est établi dans un autre pays, l’entreprise conserve des responsabilités en termes de protection physique et mentale. Ces obligations couvrent plusieurs points :

  • Une évaluation des situations sensibles liées à l’isolement, aux outils numériques ou à la posture de travail
  • Un aménagement horaire contribuant à un rythme équilibré entre vie professionnelle et personnelle
  • Une communication claire concernant les droits du salarié sur la couverture sociale appliquée dans le pays de résidence

La charte ou le contrat devra aussi spécifier les procédures encadrant la déclaration d’un incident (tel qu’un accident de travail), en tenant compte du système local en matière d’assurance et de prévention.

Témoignages et exemples pratiques

« Tout était posé dans mon contrat. J’ai pu partir sereinement en sachant que les règles étaient définies. L’entreprise a même prévu des sessions de sensibilisation pour la sécurisation des données, ce qui m’a largement rassuré. »

Au quotidien, la réussite d’un salarié à l’étranger dépend d’un accompagnement structuré. Lorsque l’entreprise anticipe les démarches (visa, couverture sociale, mentions légales), elle facilite l’intégration dans un environnement distant tout en limitant les erreurs administratives. Certaines sociétés incluent désormais dans la charte de télétravail des annexes spécifiques à la mobilité transnationale, et mettent à disposition des outils de suivi : portails RH, formations, procédures standardisées.

Un responsable digital en témoigne : « Avec l’accord mis en place, j’ai pu m’installer trois mois en Espagne et continuer mes projets. En étant bien encadré, j’ai pu maintenir ma productivité. Le dialogue avec le service RH a également été renforcé. »

Tableau comparatif des réglementations

Voici un aperçu de quelques obligations par pays :

PaysAutorisation employeur requiseVisa/permis de travailRisques fiscaux majeurs
FranceOui (via charte ou avenant)NonAssez faible (sauf cas particulier)
AllemagneOuiVariable selon le salariéImportant si présence prolongée
États-UnisOuiSouvent nécessaireÉlevé (dépend de l’État concerné)
CanadaOuiAssez souvent requisConséquences fiscales possibles
Quelles démarches prévoir avant d’effectuer une mission à l’étranger en télétravail ?

Le salarié doit adresser une requête écrite, précisant le pays, la durée, les dates ainsi que les conditions. L’approbation de l’employeur prend ensuite la forme d’un avenant formalisé, intégrant une clause juridique sur la législation applicable.

Quel est le contenu essentiel dans le cadre juridique ?

La structure d’accueil du télétravail doit être encadrée par une charte ou un accord collectif, intégrant des informations sur les obligations fiscales et sociales, la protection des données, et la sécurité du poste de travail.

Quels sont les impacts en matière de fiscalité ?

Le principal enjeu réside dans la potentielle création d’une entité fiscale locale. Cela peut impliquer des obligations nouvelles : déclarations, redevances, ou autres exigences administratives dans le pays où le salarié travaille. Un conseil spécialisé est souvent utile à ce stade.

Quels risques en cas de non-respect ?

S’il n’y a pas de validation formelle, différentes sanctions peuvent s’appliquer : mises en cause internes, pertes de dossier juridiques, manque de couverture sociale ou contentieux en cas d’accident. Une bonne anticipation évite ces désagréments.

Comment gérer l’assurance santé d’un salarié à l’étranger ?

Dans l’espace européen, le rattachement à la sécurité sociale d’origine reste souvent valide. En dehors de cette zone, il convient de vérifier les règles locales, ou de souscrire une couverture privée temporaire en fonction des conventions existantes.

Le télétravail depuis un autre pays est une solution pratique pouvant répondre aux besoins de mobilité des salariés et à certaines stratégies d’entreprise. Toutefois, la multiplicité des règles incite à une préparation minutieuse : établir une charte claire, déterminer la législation applicable au contrat, et évaluer les enjeux fiscaux locaux. S’ajoutent des considérations liées à la protection des données, à la santé au travail ou encore à la couverture sociale. En structurant les procédures et en informant clairement les parties concernées, l’entreprise améliore la qualité de l’expérience proposée tout en maîtrisant les contraintes extérieures.

Sources de l’article :

  • https://travail-emploi.gouv.fr/teletravail-mode-demploi
  • https://www.economie.gouv.fr/entreprises/gerer-ses-ressources-humaines-et-ses-salaries/entreprises-ce-que-vous-devez-savoir-sur
  • https://travail-emploi.gouv.fr/teletravail